Dans les océans de choses à gravir, il y avait ces monceaux de normes, oui. Comment mon corps si pesant pourrait-il survivre à ce qui ne se dit pas, mais entaille toujours ? J’aurais voulu disparaître, et puis vivre dans des pensées pures. J’ai voulu m’arracher la peau du crâne, mais je hurlais toujours.
C’est-à-dire qu’il fallait souffler encore, pour respirer un jour.
J’ai commencé à changer mon regard sur elles.
J’ai regardé les autres femmes, me dépouillant par lambeaux de la haine ancrée, des peurs et des insécurités. J’ai lu pour comprendre et c’était à nouveau de l’air.
J’ai vu que j’aspirais le temps par mon enveloppe déformée, tu vois ? Ce qu’on lui fait subir, et surtout, la négation profonde que l’on est. Alors, j’ai regardé, doucement. C’est comme si je comprenais enfin les choses quand elles ne passent pas par moi, en miroir.
Depuis, ma tristesse a le visage de ma colère, et inversement.
Devant le temps perdu, devant l’injustice infinie, devant l’immensité que l’on souffre.
Tout ce temps volé.
Je suis plus heureuse, pourtant.
J’ai aimé les femmes avant de m’aimer,
mais c’était nécessaire.
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Sur l’inspiration de l’atelier d’écriture de Kiyémis
Photographie d’Émile-Constant Puyo