La fatigue me parcoure les yeux et le vent glacial me pénètre la bouche. La mer est encore loin et je voudrais être là ; pourtant la vie me parcoure le temps. Et c’est une autre histoire à voir, que je ressens. Les paysages défilent à n’en plus finir, et la longue silhouette à mes côtés m’apaise de son ombre.
Nous avons cheminé depuis un temps qui me paraît éternel ; quelques jours seulement peut-être. L’immensité est là, et je ne vois que la fumée des villes, à travers les reflets du désert. Mes pas s’enfoncent dans les dunes et la lune est soudain haute. Je sens perler les grains sur mes chevilles et c’est une sensation agréable, même quand on l’oublie.
Il marche à mes côtés et j’en suis heureux. Je le sens auprès, jamais on ne s’éloigne trop. Il parle peu mais parfois, il chante. Et sa voix résonne dans cette immensité claire, que les nuages traversent. Nous nous arrêterons bientôt dormir, mais nous profitons de la fraicheur pour avancer encore, comme le vent nous y engage.
Mes yeux, parfois, parlent sans rien dire et il me répond qu’il ne sait pas exactement ce que nous cherchons mais qu’il a confiance en nous et que la mer sera notre deuxième étape. Je l’écoute et je marche, car depuis le premier jour mon cœur l’a aimé. Je me souviens de notre rencontre, je me souviens l’avoir trouvé beau. Cette présence calme, ces mains légèrement vieillies et ce regard franc. C’était il y a déjà des mois, me dis-je, mais le temps m’avait perdu. Nous allons dans le sable blanc.
Lorsque nous dormons, le sable froid nous recouvre et son contact me paraît comme de l’eau ; je rêve alors que nous sommes arrivés. Pourtant, la mer est loin, encore loin, toujours loin et les vagues fraiches du sable ne portent les embruns que du soleil et de la nuit. Parfois, mon esprit n’a pas besoin de dormir pour se perdre tout à fait et le long du jour, je m’en vais dans des allées lointaines, dans le creux des montagnes ou des collines, ou dans des paysages que l’imagination entière me dicte.
Le ciel partout, ses bras immenses qui s’abattent sur le sable. Le ciel infini que la lune patine. J’ai peur parfois qu’il vienne avaler mon compagnon, et me laisse seul ; j’ai peur que la nuit me l’enlève. La nuit n’est jamais complètement noire, le ciel luit et ouvre sa profondeur, montrant les étoiles qui percent ses entrailles. Je les entends parfois frémir.
***
Camp Nanowrimo – jour 14